Retour sur notre deuxième marché de la poésie

Nous avons vécu de belles rencontres sur le marché de la poésie, dans le vent de la place Saint-Sulpice. Nous avons vu de beaux rayons de soleil lécher les tours de la grande église et les statues des prédicateurs de la fontaine. Nous avons ramassé des livres tombés, nous nous sommes fait agresser par des poètes furieux de ne pas être publiés par nous ici et maintenant. Nous avons connu l’attente, beaucoup d’attente, des gens qui passent sans s’arrêter et cet étrange sentiment d’attendre le chaland alors que nous ne voulons pas attendre le chaland. Nous avons bu des cafés mi-froids et mangé des sandwichs de chez Gérard Mulot. Nous nous sommes interrogés sur le principe même d’un stand, des livres sur l’étal, des gens qui feuillettent et repartent, est-ce une bonne chose, est-ce bizarre ? Nous nous sommes demandés pourquoi nous avions créé une maison d’édition et d’ailleurs des badauds nous l’ont demandé aussi, une bonne question. Une question à laquelle nous avons plusieurs réponses, contradictoires entre elles alors nous ne les exprimons pas toutes en même temps, aux mêmes personnes. Nous nous sommes dit, comme la dernière fois : la prochaine fois nous ne serons pas là, ça ne sert à rien, mais peut-être que la prochaine fois nous serons là, car they also serve who only stand and wait. Et parce que nous avons vendu presque cent livres, rencontré quelques professionnels – libraires, enseignants, bibliothécaires. Et l’ambiance entre confrères est sympathique. Sur notre stand 611, nous n’étions pas seuls, Malo Quirvane se réchauffait auprès des éditions Chandeigne et A Propos. Nous avons servi des verres aux amis de passage et aux inconnus qui regardaient nos verres non sans envie. Nous avons souffert d’exister car une maison d’édition aussi, c’est une névrose existentielle. Mais c’est une entreprise tout de même et de retour chez soi il faut compter les stocks, établir les comptes, reprendre le chemin de la création, du commerce, du développement. Mais le développement peut prendre diverses directions, pas toutes à la fois, et comment choisir ? Choisir c’est renoncer, choisir c’est avancer.

C’était notre deuxième marché de la poésie, le premier avait eu lieu en 2019. L’événement avait été annulé l’année suivante, pour cause de coronavirus. Pourquoi créons-nous des entreprises alors que nous pourrions être salariés ? Pourquoi publions-nous des livres alors que nous pouvons lire des milliers de phrases intéressantes et belles sur Internet ? Pourquoi, pour exister ? Pour aimer ? Pour offrir ? Pour grandir ? Pour prendre ?

 
 
 
 
 
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